Achillea millefolium.
En quoi consiste la divination par l’achillée que LV appelle achilléomancie ?
Les tiges séchées de l'achillée sont utilisées comme bâtonnets pour tirer au sort, par un système de manipulations répétitives, six nombres correspondant à des hexagrammes du Yi Jing. Le procédé se veut symbolique du changement perpétuel des phénomènes de l'univers (transformation d'un hexagramme dans un autre).
Pourquoi l’achillée ? Peut-être en raison d’une particularité botanique. C’est une plante donnant une multiplicité de ramifications à partir d’une seule tige, de même que les dix mille êtres sont générés par l’Un qui est principe de tout. Les hexagrammes tels qu’ils se transforment les uns dans les autres sont les figures de tous les phénomènes pouvant advenir par mutation les uns dans les autres dans toutes les conjonctures possibles. La nouvelle procédure par chiffrage du Yi Jing est conduite par la même morpho-logique que celle de la divination par la tortue. En effet, si la spéculation s’exerce maintenant sur les nombres, ce n’est pas aux calculs numériques, mais aux formes numériques qu’elle s’intéresse, notamment aux formes de l’opposition du pair et de l’impair : les nombres
ne sont pas représentés par des chiffres mais par une notation qui n’en
exprime que la valeur paire (yin) ou impaire (yang).
La tradition chinoise influencée par les Zhou qui ont voulu se distinguer des Schang a occulté la continuité entre la divination par la tortue et la divination par l’achillée, prépondérante avec les Zhou. Selon la tradition, les trigrammes ont été inventés par Fuxi, personnage mythique, premier souverain du monde subcéleste. Le dédoublement des trigrammes en hexagrammes serait l’œuvre du roi Wen, le premier des deux fondateurs de la dynastie Zhou.
LV s’attache, au contraire, à démontrer la continuité entre les deux types de divination. En fait la divination par l'achillée est la continuation de la rationalisation observée dans la scapulomancie. La standardisation des craquelures scapulomantiques ayant réduit leur nombre à cinq ou six variantes, l’idée est venue aux devins de les numéroter pour les tirer au sort, de manière à substituer cette procédure très commode à celle difficile du brûlage. Comment est conservé dans l’achilléomancie le modèle cosmique observé dans la divination par la tortue ? Tout d’abord dans la règle des six tirages au sort. Cette règle s’est probablement établie par référence à l’espace cosmique à six directions (les quatre points cardinaux et le haut et le bas) de la tradition chinoise. « Tirer au sort six fois, dans toutes les directions de l’espace, répond à une transposition achilléomantique du modèle cosmique de la tortue ». Par ailleurs, « dans la procédure canonique de tirage au sort … c’est le nombre de cinquante tiges que doit comprendre exactement le faisceau de tiges d’achillée représentatif du cosmos à la place de la tortue. Le nombre de 50 est, en effet, celui de la « grande évolution » (dayan), celle de tous les changements continuels du monde. Cependant, pour être manticologiquement activé, ce nombre est d’emblée diminué par le retrait de l’une des cinquante tiges afin que soit créé un potentiel de mutation par aspiration de ce qui incomplet à devenir complet…..Symboles algébriques de toutes les mutations phénoménales se produisant dans le cosmos, les 64 hexagrammes…constituent à partir du Yi Jing, le fonds inépuisable de la spéculation manticologique chinoise, qui n’a de comparable dans les autres cultures que le fonds qu’a constitué la Bible pour la spéculation théologique occidentale. »
A suivre,
Jean-Louis